Du fond du gouffre où mon coeur est tombé, du fond des jours sombres, du fond des yeux tristes, il est un horizon où point la lumière. Un horizon que la musique sait me rappeler quand je n’arrive plus à le percevoir. Quand derrière les sourires, c’est la noirceur tout au fond qui recommence à envahir tout. Qui me submerge et m’engloutit tout entière.
Epuisée de faire en sorte que le monde autour de moi soit tel que je le rêve. Epuisée de vouloir oublier les blessures. Epuisée de vouloir tout mener de front. Epuisée de ne pas y arriver. Epuisée de sourire malgré tout, épuisée de faire semblant.
Epuisée, j’ai dû laisser ma plume de côté quelque temps. Je me suis recroquevillée dans ma bulle. J’ai ramassé les débris de mon coeur. J’ai cherché la lumière que je ne trouvais plus.
Elle n’est pas encore complètement réapparue, des ajustements sont encore à trouver, mais l’horizon commence à se faire jour. La musique et le calme m’aident à le percevoir de nouveau. Alors j’essaie de regarder au loin, de reprendre la plume, de recommencer à partager. Pour cela, j’aimerais vous parler d’un album qui m’a accompagnée le long de ces jours où j’avais sombré. Un album fraîchement paru et que j’avais attendu avec impatience, puisqu’il n’est autre que celui des post-rockeurs qui savent le mieux toucher mon âme. Ceux qui sont à l’origine des plus beaux chefs d’oeuvre du genre, et surtout des plus éblouissantes émotions lives.
Nouveaux sons, nouvelles audaces, nouvelles merveilles. Ainsi pourrait se résumer « The Wilderness », le nouvel album des texans d’Explosions In The Sky.
Forts d’un son unique au monde et d’un savoir-faire inégalé, ils demeurent pour moi, avec ce sixième album, les maîtres incontestés du genre. Indétrônables dans l’art du jaillissement d’émotions.
Avec « The Wilderness » et sa tumultueuse pochette signée par l’artiste Jacob van Loon, ils se jouent de tous ceux qui disent le post-rock instrumental mort et enterré, en élargissant avec brio leur palette sonore, et en fournissant la preuve qu’ils n’ont pas perdu de leur inspiration. Ainsi n’ont-ils pas peur de se réinventer, de sortir de leur zone de confort, mais sans jamais se départir de ce qui fait leur substantifique moëlle : ce travail remarquable sur les textures et ce son unique au monde.
Depuis 2011 et le réussi « Take Care, Take Care, Take Care », le quatuor texan a collaboré à des bandes originales de films délicates et intimistes, prouvant qu’il sait faire autre chose que des longues symphonies de post-rock aérien. Ainsi est-il parvenu, dans des pièces plus courtes, à développer une autre de ses facettes et à porter des émotions tout aussi riches et variées que sur ses compositions épiques, comme en témoigne la très jolie musique composée pour l’initiatique et verdoyant « Prince Avalanche » de David Gordon Green (ma chronique à relire ici).
« The Wilderness » s’inscrit dans la lignée du talent originel du groupe, conjuguée à ce que lui a apporté le travail avec le cinéma. Il est une épopée subtile et subtilement construite.
Ici, les ruptures sonores et les contrastes sont moins forts, les tonnerres de distorsions moins tonitruants, mais le groupe a déjà composé son The Only Moment We Were Alone, son With Tired Eyes, Tired Minds, Tired Souls We Slept, ou encore son Snow And Lights, et ces beautés magistrales n’en finiront jamais de nous enchanter. A présent, les Explosions In The Sky agrémentent leurs cieux de nouvelles atmosphères. Moins rageuses mais tout aussi belles. Elles sont osées tout en restant intemporelles et, pour ma part, je les trouve admirablement réussies.
Un séquenceur ouvre le bal, dans le morceau qui a donné son nom au disque. Mais Wilderness ne fait pas que donner son nom au disque : il lui donne le ton. D’emblée, un paysage se peint. Sauvage et inconnu. Guitares, basse et batterie se déploient aux côtés de ces nouveaux éléments électroniques savamment introduits par le groupe. Et puis il y a ce piano, qui surgit dans un souffle. Magique. The Ecstatics enivre de sa rythmique chaloupée. Les guitares sont telles que le groupe en a le secret, tout en dentelle. Tangled Formations s’ouvre sur les notes d’un piano lointain avant de s’emballer au rythme d’une chevauchée tout en percussions et en saturations. Chevauchée qui ralentit puis accélère de nouveau, avant de changer de direction, surprenant l’auditeur à chaque détour mélodique. Puis vient le fabuleux Logic Of A Dream. Premier extrait dévoilé par le groupe avant la sortie du disque, première révélation de ces nouvelles sonorités, et morceau qui demeure à mon sens le plus merveilleux du disque. De ses sons synthétiques à la fois lourds et vaporeux, de ses percussions puissantes, de ses guitares virevoltantes, Logic Of A Dream ressemble à un avion qui décolle. Admirablement construit, il fait s’envoler les émotions sur son passage. Sublime.
Les formats des morceaux sont un peu plus courts qu’à l’accoutumée, mais les mélodies n’en sont pas moins amples. Explosions In The Sky a le sens du détail, et l’ensemble du disque est minutieusement construit. En forme d’échappée sauvage envoûtante.
Disintegration Anxiety accélère le rythme et épaissit le son de ses vibrations distordues. Puis le rythme ralentit sur Losing The Light, son ouverture énigmatique, son clavier et son violoncelle enivrants. Un rêve semble prendre forme derrière un nuage de sonorités à la fois éthérées et inquiétantes. Le très court Infinite Orbit vient ensuite sonner le réveil, en forme de course folle à la progression éclatante. Colors In Space annonce la dernière partie du voyage, coloré, envoûtant. Parfaite transition vers la pièce finale, l’apothéose signée de la patte du quatuor texan, incarnée dans le délicat Landing Cliffs. Ce morceau où tournoient les sons et les émotions. Ce morceau où douceur et beauté rivalisent avec brio. Une clôture de disque dont on découvre un peu plus les subtilités infinies à chaque écoute.
« The Wilderness » est un opus d’une beauté saisissante, à l’image des anciens merveilleux albums du groupe. Mais il est bien plus que ça : il est sublime dans son audace et sa sensibilité.
Les Explosions In The Sky sont en tournée mondiale depuis le 19 avril, ils seront notamment à Paris le 9 juin, au Trianon. Et ça s’annonce déjà grandiose.
Merci à eux d’être un si beau remède aux jours sombres. Et merci à vous tous de votre fidélité à ce petit blog, et de vos témoignages musicaux et amicaux qui contribuent à apporter lumière et douceur dans ma vie.
A découvrir, les 9 vidéos qui illustrent les 9 titres de l’album :
Tracklist :
- Wilderness
- The Ecstatics
- Tangled Formations
- Logic Of A Dream
- Disintegration Anxiety
- Losing The Light
- Infinite Orbit
- Colors In Space
- Landing Cliffs
Site web : http://www.explosionsinthesky.com/
Love,
Eglantine / Totoromoon
Et bien totoro Girl, que t’arrive t’il ? Ce n’est pas le moment de faire un coup de moins bien….oui ; tes posts et ton écriture manquaient….
Tu sais, le problème dans ce monde, c’est que les imbéciles sont pleins de certitudes et que les gens intelligents pleins de doutes….En te lisant, je retrouve parfois un peu ce que j’aurais pu écrire si j’avais eu ton talent d’écriture.
Les beaux moments vont revenir, et tu vas rebondir et foncer à travers les jours heureux en chat bus….
Amitiés !
Merci Emeric pour ce petit mot qui m’a réchauffé le coeur ♥
C’est très touchant ce que tu écris. Du fond des abysses on ne voit pas l’espoir, la lumière mais ils sont toujours là. Bonne remontée.
Set and setting, a vivid memory moi ça me donne la pêche.
Cheers
Merci beaucoup Alain pour ce gentil message. Je suis entrain d’écouter Set and Setting, je ne connaissais pas, c’est à la fois beau et énergisant : un grand merci ♥