FONTAINES D.C. Skinty Fia

En 2020, au détour d’un hasard heureux d’internet, je tombais d’amour pour Fontaines D.C. J’y trouvais le post-punk de mon enfance au sommet de son art. J’y trouvais ces textes, portés par un accent indomptable, venus me cisailler les entrailles. J’y trouvais la rage contenue, l’urgence, la mélancolie. De ballades lancinantes en exutoires acérés, j’en savourais la beauté perçante et furieuse, au fil de mes écoutes frénétiquement répétées.

Moins de deux ans après le sublime « A Hero’s Death », les Dublinois de Fontaines D.C., désormais basés en Angleterre, dévoilaient au printemps « Skinty Fia », leur troisième album. Un album aussi sublime que son prédécesseur, qui confirme le talent désormais incontestable du quintet irlandais.

« Skinty Fia », ou la damnation du cerf. Nommé d’après un juron gaélique, et illustré de ce cerf géant irlandais aujourd’hui disparu, qui semble apeuré dans un hall de maison aux escaliers et tableaux branlants, rougi et inquiétant, ce nouvel opus place d’emblée la question de l’identité au coeur du propos de Fontaines D.C. Hommage sentimental à ses racines, réflexion sur la culture irlandaise et sa réception complexe en Angleterre, peurs injustifiées mais aussi disputes d’amoureux, tels sont ainsi les thèmes qui se dessinent au fil des textes toujours ciselés du groupe. Scandés par une voix plus réverbérée que par le passé et accompagnée çà et là de quelques choeurs habités, ceux-ci se déploient en faisant corps avec les instruments. Basse hypnotique et puissante, guitares vibrantes, percussions saccadées et entraînantes viennent ainsi porter un propos à la fois personnel et engagé.

De son ouverture chantée en Irlandais In ár gCroíthe go deo, magnifique morceau qui signifie « dans nos coeurs pour toujours » et qui s’est ancré dans le mien dès la première écoute, à Nabokov, qui le clôt de ses riffs fiévreux, en passant par l’aussi simple que superbe duo voix et accordéon de The Couple Accross the Way, « Skinty Fia » développe dix pièces fortes d’une belle variété, dont chacune raconte une histoire à sa manière, à la fois audacieusement et harmonieusement mariée à celles qui la suivent ou la précèdent.

Ici, les mélodies s’accrochent immédiatement aux souvenirs, revenant virevolter à loisir dans les esprits, à mesure que le temps fuit. Tantôt énergiques, tantôt déchirantes, elles s’envolent au gré de tempos tantôt vifs, tantôt ralentis, quand prennent le temps de s’épanouir des atmosphères façonnées par des textures sonores soignées. Là où, partout, ne manquent jamais de venir affleurer les émotions, à la faveur d’un travail remarquablement mûr et profond du début à la fin de ces dix chansons.

« Skinty Fia » est disponible depuis le 22 avril aux formats numérique, CD et vinyle via Partisan Records.

Pour découvrir l’album :

Tracklist :