
Il y a chez A.A. Williams cette forme de sensibilité fragile heurtée à une irrésistible force de vie qui résonne en moi comme un miroir de ce que je suis. Il y a cette sobriété juste heurtée au rugissement d’un coeur passionné. Il y a cette retenue pudique heurtée aux confidences désarmantes.
A l’image de la pochette de « As The Moon Rests », son nouvel album, et de sa magnifique prestation parisienne en première partie des post-rockeurs japonais de Mono, à laquelle j’ai eu la chance d’assister à la fin de l’été, A.A. Williams n’en finit pas de briller dans l’art des contrastes. Du haut de sa jeune mais déjà remarquable carrière, elle donne au clair-obscur une figure. Là où le blanc se heurte au noir et s’évanouit dans le gris. Là où perce la lumière d’un projecteur clair à travers l’obscurité d’une salle de concert. Comme une beauté qui s’ignore, elle avance ainsi à la fois en majesté et sur la pointe des pieds.
Enregistré en studio et non à la maison, « As The Moon Rests » bénéficie d’une production léchée, aux sonorités plus épaisses, plus texturées et plus finement travaillées. Pour le réaliser, la musicienne s’est entourée d’un orchestre à cordes convoquant mieux qu’aucun autre une nappe supplémentaire de mélancolie, à la faveur d’arrangements à la fois riches et précis.
Long de onze titres et de plus d’une heure de musique, harmonieusement maîtrisé et cohérent de bout en bout, il est tout à la fois fragile et puissant, et réussit l’exploit d’avoir le sens du drame sans être grandiloquent. S’y expriment dans une forme émouvante d’introspection à la fois le pouvoir controversé de l’amour entre deux êtres, mais aussi la colère, le désespoir, la tristesse, la solitude, la lutte contre ses propres prisons mentales et contre le côté obscur de soi-même.
A la faveur d’instrumentations presque toujours sombres, faites de boucles de guitares tantôt atmosphériques, tantôt métalliques, et d’une voix qui sait, sans jamais en faire trop, se déployer de manière aussi plaintive que lumineuse, l’album peint une atmosphère aussi vibrante qu’inquiétante, portée par un fragile équilibre entre ombre et lumière.
De Hollow Heart, qui l’ouvre dans une cavalcade de voix et de batterie, à As The Moon Rests, son morceau-titre qui le clôt dans un éclat sublime d’intenses émotions, en passant par quelques morceaux acoustiques drapés d’un espoir doux, chacun des titres de l’album est ainsi fait de textes intimes sublimés par la voix envoûtante de la musicienne. Elle est claire mais habitée, lente mais urgente. Elle s’enroule autour des belles montées en intensité des instruments, puis s’efface pour les laisser s’exprimer puis exploser en majesté. On la compare à PJ Harvey, Chelsea Wolfe ou encore Emma Ruth Rundle, mais A.A. Williams, pour moi, est unique. Un magnifique album.
Holding on
Feeling everything I am come undone
I wish I could just evaporate
Take my thoughts and slowly separate
… I can’t stop the violence in my mind
Every day, I try just to survive
« As The Moon Rests » est disponible depuis le 7 octobre aux formats numérique, CD et vinyle via Bella Union.
Pour découvrir l’album :
Tracklist :
- Hollow Heart
- Evaporate
- Mumurs
- Pristine
- Shallow Water
- For Nothing
- Golden
- The Echo
- Alone Into The Deep
- Ruin (Let Go)
- As The Moon Rests
Site web : https://www.aawilliamsmusic.com/
Bandcamp : https://aawilliams.bandcamp.com/
Facebook : https://www.facebook.com/aawilliamsmusic
A.A. Williams chez Bella Union : https://bellaunion.com/artists/a-a-williams/
Eglantine / Totoromoon
Une réflexion sur “A.A. WILLIAMS As The Moon Rests”